Avant que l’œuvre existe, l’artiste circule dans son univers à elle, l’observe dans ses menus détails, s’émerveille de microévénements qui se captent si difficilement dans une photographie. Elle ne peut résister à en recueillir tout de même certaines traces : la délicatesse de cette constellation d’asters, la texture de cette écorce, le tracé de ces brins d’herbe, les perles de cette lumière. Les restes imparfaits conservés de ces instants fugaces deviennent le matériau pour de nouveaux mondes à concevoir, à la manière des débris végétaux qui recouvrent le sol des jardins ou des forêts : de petits riens qui s’assemblent pour constituer un habitat pour de nombreuses espèces.
À partir de découpes réalisées dans ses photographies et ses dessins, Noelle Wharton-Ayer crée ses photogrammes un peu comme elle aménagerait un jardin, où de petites mains s’affairent à prendre soin d’un plant, à en diviser un autre pour le déplacer ailleurs et le faire cohabiter auprès d’un autre à nouveau. Et chaque fois, bien qu’une composition finale ait pu s’imaginer, les éléments ainsi placés s’allient comme bon leur semble, se parlent et se transforment, nourrissent le lit de leur propre monde. Appelant ainsi au mystère de toute création, l’exposition invite à voir là des espaces où se réfugier, ou encore mieux rêver.
Bedfellows a été réalisée dans le cadre du programme de résidence-exposition de VU et fait partie de la programmation et tout ce que ça prend, qui se penche sur les forces et les ressources qui nous animent, sur ce qui, en nous et à l’extérieur de nous, peut s’avérer être autant un potentiel qu’une menace.