Un astrophysicien célèbre se demandait un jour si l’explication scientifique d’un phénomène pouvait nous rendre moins sensible à s’en émerveiller. Sa réponse fut rassurante : la science n’exclut jamais le hasard, et une certaine poésie se trouve dans les hasards. Ainsi, la recherche de l’artiste se situe non loin des « jeux de la nature [qui] ont engendré une variété quasi illimitée de structures complexes »*. À la manière de biologistes scrutant les textures d’une cellule ou d’astronomes contemplant l’étendue du cosmos, il est possible d’ainsi observer les moindres détails de notre monde, mais pour y chercher des images qui interpellent les sens. Ainsi des résidus végétaux pourront prendre l’apparence d’une fleur préhistorique, un banc de neige sale fondant au printemps prendra les allures d’une vague déferlante, des dessins de givre donneront l’impression d’une forêt enchantée.
À la base, ce serait juste de l’eau, un peu de vapeur, des cristaux qui fondent, des substances qui se décomposent. C’est à partir de ces presque riens qu’Idra Labrie crée des œuvres dans lesquelles s’installe un imaginaire foisonnant. En cultivant le hasard d’une eau qui gèle ou en cueillant les formes éphémères qui apparaissent dans son quotidien, il nous amène à voir ce qu’il y a de plus lointain dans ce qui se trouve juste là, sous nos yeux. C’est finalement peut-être tout simplement le regard que l’on porte sur les choses qui provoque la naissance d’une image.
*Hubert Reeves, Malicorne. Réflexions d’un observateur de la nature, Paris, Seuil, 1990.





