Liminaire : en tête d’un ouvrage, préface, début d’un discours —un texte de Sabrina Clitandre

Texte pour l’exposition Face-à-face / pli selon pli de Emmanuelle Duret, Andréanne Gagnon et Marc André Jésus.

 

Les premières fois, on s’en rappelle toujours. Premier jour, première rencontre, première fois, les premiers moments ont un potentiel mémorable souvent exceptionnel. Marquants, on y repense, on les revit, y réfère, les interprète…

On en fait des souvenirs mémorables, qu’on module en accentuant certains détails. Car les souvenirs ont ceci de commun qu’ils se déconstruisent et se reforment au gré des modulations de l’esprit.

Mais une première fois, comme une première exposition, peut être constituée de plusieurs éléments forts qui seront toujours cultivés éventuellement. Une impression forte, une image remarquable, un sujet inspirant, voilà autant d’éléments qui se retrouveront dans les futures rencontres ou propositions artistiquement : il est fascinant de constater à quel point les préceptes forts de l’iconographie de plusieurs artistes étaient déjà présents dans leurs premières créations. Dans cette optique, assister à la genèse d’une carrière artistique est non seulement un point tournant, mais d’une certaine façon, un privilège — les plus avisés y décèleront les traces de créations à venir.

« Créer, c’est se souvenir », écrivait Victor Hugo; voir les premières créations professionnelles d’artistes, c’est immortaliser l’éphémère pour comprendre et entrevoir ce qui est à venir. Les premières œuvres possèdent intrinsèquement une fierté et une émotion, voire une fébrilité, qui seront déclinées plusieurs années durant : les prémices du style y sont souvent déjà.

Créer et se souvenir peuvent se générer l’un et l’autre; le truchement des deux, c’est le début d’un discours sensible. Les nouveaux artistes osent et exposent — que cette exhibition liminaire soit sans douleur!

Publié le 5 septembre 2013
Par VU