Texte pour l’exposition Comme un murmure de Normand Rajotte.
Il faut avoir été jeune et solitaire parmi le silence de la forêt, empreint d’odeurs sur le feutre épais de l’automne, transi de neige jusqu’aux bruissements du printemps, pour se saisir, au plus près du souffle, de la respiration de la nature.
C’est peut-être pour ranimer ce souvenir, en lui et en nous, que Normand Rajotte est ingénié à traduire en images la densité des soupirs et murmures, qui grouillent, là, dans les sous-bois laurentiens. Les piétinements des oiseaux migratoires – déjà envolés – dans la vase, les traces d’insectes effacées par les mouvements imperceptibles de l’eau sur le rivage, un coup de nageoire fuyant dans l’onde qui brouille le fond du ruisseau : photographier, comme pour cueillir le trésor secret de tout un royaume en équilibre. De telles images prennent leur sens dans les remous d’une paix vacillante, qui, sur le point de se rompre et à l’instant du danger, livre ses fragiles instants de vérité. Intriqués, document et poème nous sont offerts, comme le caillou blanc ou le bouquet de fleurs sauvages qu’un enfant rapporte de ses aventures.