Éclaireurs·euses 29 —Maya Moumne + Fatine-Violette Sabiri

During the first years there, I carried with me the feeling of a deep uprootedness.
(Etel Adnan, The Cost for Love We Are Not Willing to Pay, 2011)

 

 

This is one of the many things the artist and poet Etel Adnan wrote in exile: in the 1950s, she left Beirut for California, where she spent several decades. Adnan’s relationships to the places she called home pulses through the veins of her paintings, poetry, and other writing.

For years I have been obsessing over the representation of collective melancholy through the medium of photography and writing as a restoration of collective hope, tracing this expression by artists across different generations. Fatine-Violette Sabiri, a Casablanca-born, Montreal-based photographer, began documenting home with a film camera when she was a teenager. Her work comprises portraits, landscapes, and still lifes made in Montreal and Casablanca over a period of almost a decade.

There is vital significance in stories, storytelling, and photographic documentation. Representing intimacy with spaces, places, memory, and the performance of self, collecting one’s own private life is an act of revolt. Documenting intimacy and fantasy is a means of reconciling ourselves with agency and reclaiming the gaze. Sabiri’s works draw connections between Montreal and Casablanca, and the intimacy of the photographs testifies to the unease and hesitation with which one speaks of home, if indeed we perceive the home to denote stability.


The hardest of all revolutions is the one at Home—all dictators go home. And sometimes the revolution is to leave Home.

(Mona Eltahawyai, I Own My Body, in Hayya Magazine, Issue 1, 2022)

 




 

 


 

 


 

 


 

 


 

 


 

 


 

 

 


 

 



 

 

Au cours des premières années là, j’ai porté en moi un sentiment de déracinement profond.
(Etel Adnan, The Cost for Love We Are Not Willing to Pay, 2011)

 

Voilà l’une des nombreuses réflexions qu’a écrites l’artiste et poète Etel Adnan durant son exil : dans les années 1950, elle a quitté Beyrouth pour la Californie, où elle a passé plusieurs décennies. Les liens qui ont uni Adnan à ses milieux d’adoption irriguent ses peintures, poésies et autres textes.

 

Je nourris, depuis des années, une obsession pour la représentation de la mélancolie en photographie et en littérature, cherchant cette expression chez les artistes de différentes générations, où elle restaure un espoir collectif. Photographe montréalaise née à Casablanca, Fatine-Violette Sabiri a, adolescente, entrepris d’immortaliser son environnement à l’aide d’un appareil photo argentique. Son œuvre comprend des portraits, des paysages et des natures mortes captés à Montréal et à Casablanca sur une période de presque dix ans.

 

Il y a une signification existentielle dans le récit, le conte et la narration photographique. Reflet de l’intimité d’une personne, de ses comportements, sur fond d’espaces et de lieux chargés de souvenirs, le collectionnement de la vie privée est un acte de révolte. Rendre ainsi compte du secret et de l’imaginaire est un moyen de retrouver le chemin de l’agentivité et de reconquérir le regard. Les œuvres de Sabiri mettent en correspondance Montréal et Casablanca, et la nature intimiste de ces photographies traduit le malaise et l’hésitation inhérents à l’évocation du chez-soi, si tant est que l’on conçoive cet endroit sous l’angle de la permanence.

 

La plus dure des révolutions est celle qui se joue chez soi – tous les dictateurs rentrent à la maison. Et parfois, la révolution, c’est de quitter celle-ci.
(Mona Eltahawyai, I Own My Body, dans Hayya Magazine, Issue 1, 2022)

 

 

 

 

Publié le 23 mars 2023
Par VU